août 2024
Sujets mensuels sur les marchés boursiers
Un examen des tendances et des dynamiques des marchés boursiers mondiaux.
Ross Cartwright
Stratège principal,
Groupe des solutions de placement
À la lumière des données plus faibles que prévu sur l’indice des prix à la consommation (IPC) de juin aux États-Unis et des commentaires conciliants du président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell, les attentes d’un atterrissage en douceur et d’une baisse de taux en septembre se sont raffermies. Cela a entraîné une forte remontée de plus de 10 % des petites capitalisations en quatre jours, à compter du 10 juillet1.
Les petites capitalisations sont-elles de retour? La baisse des taux aidera-t-elle? L’histoire montre que le rendement des actions peut varier considérablement pendant les cycles de réduction de taux de la Fed. Bien que chaque cycle soit différent, la force motrice est habituellement la vigueur de l’économie sous-jacente. Si le cycle de réduction de taux est une normalisation de la politique monétaire (un scénario d’atterrissage en douceur), les marchés et les actifs cycliques plus risqués se comportent habituellement bien. Toutefois, si l’économie se détériore brusquement (scénario d’un atterrissage plus brutal), le marché est généralement le théâtre de ventes massives, et les actifs risqués à bêta élevé sont ceux qui souffrent le plus.
Pour ce qui est de la performance des facteurs des petites capitalisations, nous nous attendons généralement à ce que les facteurs de qualité surpassent les facteurs cycliques au début du cycle de réduction de taux de la Fed. Cette réaction est compréhensible, étant donné que la Fed réduit habituellement son taux des fonds fédéraux lorsque la croissance ralentit et que les données macroéconomiques fondamentales se détériorent. La réaction correspondante des investisseurs est habituellement d’être réfractaires au risque et de rechercher des sociétés défensives de qualité supérieure, qui sont mieux placées pour composer avec le ralentissement ou qui pourraient profiter de la baisse des taux d’intérêt. Nous nous attendons à ce que la préférence pour les titres de qualité se maintienne au sein des cohortes de valeur et de croissance, alors que la croissance cyclique et la valeur pourraient enregistrer des rendements inférieurs en cas de ralentissement.
Tous les cycles sont différents et, dans le présent cycle, qui a commencé après la crise financière mondiale, le Russell 2000® a affiché un rendement comparable à celui de l’indice S&P 500, jusqu’aux ventes massives de 2018. Depuis, l’indice S&P 500 a foncé droit devant, et de plus en plus, au sortir de la pandémie de COVID-19, malgré une récente période de forte croissance économique, ce qui est habituellement favorable aux petites capitalisations. L’une des raisons pour lesquelles les petites capitalisations ont tiré de l’arrière cette fois-ci est qu’elles ont ressenti davantage l’incidence de la hausse des taux d’intérêt en raison de leur plus grande exposition aux taux variables, ce qui touche directement leur rentabilité.
Compte tenu de leur endettement plus élevé, principalement à taux variable, et de leur durée plus longue, il n’est pas surprenant de voir les petites capitalisations (et d’autres segments plus risqués) se redresser de façon plus énergique devant les attentes de réduction de taux par suite de la baisse de l’inflation. À cela s’ajoute l’apaisement possible des préoccupations à l’égard des banques de petite et de moyenne taille, qui constituent une importante composante de l’indice. La baisse des taux pourrait réduire une partie des pressions exercées sur les prêts liés à l’immobilier commercial et, si les taux à long terme baissent aussi, elle réduira les pertes sur les placements en obligations des banques. Toutefois, les baisses de taux ne sauveront pas les modèles d’affaires médiocres ni les entreprises surendettées.
Nous sommes d’avis qu’il s’agit davantage d’un rebond que d’une rotation, car le marché penche vers le scénario d’un atterrissage en douceur. De plus, même si ce rebond a un certain élan, il semble trop tôt pour parler d’une rotation sans être davantage convaincu d’une reprise des bénéfices des sociétés à petite capitalisation et de la probabilité d’un atterrissage en douceur. À court terme, les petites sociétés n’affichent toujours pas de croissance des bénéfices. Et même si leurs bénéfices s’amélioraient, nul ne sait s’ils le feraient plus rapidement que les bénéfices des sociétés à grande capitalisation, dont l’ampleur et la profondeur des bénéfices, comme nous l’avons souligné dans Pouls du marché, s’étend au-delà des sociétés technologiques à mégacapitalisation.
À plus long terme, nous sommes plus optimistes à l’égard des petites capitalisations, étant donné leurs évaluations raisonnables et la possibilité d’une reprise des bénéfices à long terme à mesure que les taux reviendront à la normale. Les investisseurs pourraient envisager d’être sélectifs et de se concentrer sur les titres défensifs de qualité supérieure qui génèrent de solides flux de trésorerie disponibles.
Les actions américaines ont reculé deux semaines de suite. À notre avis, l’humeur des investisseurs a changé après que l’évaluation de certains titres soit devenue un peu exagérée en marge du brouhaha suscité par l’IA. Selon nous, la baisse des deux dernières semaines n’a pas été une correction généralisée, mais un ajustement des prévisions de bénéfices pour les actions axées sur l’IA et leurs contiguïtés. Bien qu’il n’y ait aucun doute quant au potentiel de l’IA et à ses besoins d’énergie et d’informatique haut de gamme, des questions demeurent quant à savoir comment (et à quelle vitesse) l’IA sera monétisée au cours des prochaines années. Ces titres comptent parmi les plus fortement pondérés au sein de l’indice et ont contribué à son appréciation, et à son repli.
Par ailleurs, les autres titres de l’indice se sont bien comportés, et les secteurs comme les services publics et l’immobilier profitent des attentes de baisses de taux. Ce fut ainsi jusqu’au 1er août, lorsque la publication des données sur l’indice ISM a provoqué de nouvelles turbulences sur les marchés, seuls les secteurs défensifs et Meta ayant tenu le coup. L’impulsion et l’humeur des investisseurs se sont détournées de l’IA, en particulier le secteur des semi-conducteurs, qui continue de subir les plus fortes pressions de ventes alors que les investisseurs se demandent comment et quand les énormes dépenses en immobilisations que les sociétés technologiques effectuent pour construire leur infrastructure d’IA seront monétisées.
Lorsque la dynamique change aussi rapidement, il y a toujours une certaine contagion et des ventes techniques; toutefois, la faiblesse des données de l’indice ISM a fait ressortir un important ralentissement de l’activité manufacturière. La perte de vigueur de la composante de l’emploi au sein de l’indice, qui a été confirmée par les données décevantes sur les emplois non agricoles publiées le lendemain, semble avoir été encore plus préoccupante. Même si le segment de l’IA s’est peut-être emballé à mesure que les évaluations ont augmenté, l’idée d’une légère hausse du chômage et d’un ralentissement modéré de la croissance a été remise en question. Les données causent des interférences, et nous croyons que la volatilité des marchés s’accentuera à mesure que l’attention se tournera vers la croissance et le chômage, au détriment de l’inflation et des taux.
Jusqu’à présent, les bénéfices du deuxième trimestre ont largement confirmé une expansion de la croissance des bénéfices à l’échelle du marché, ce qui explique pourquoi, jusqu’à récemment, les titres non liés à l’IA continuaient de se maintenir. Nous sommes d’avis que ceux dont les ratios n’ont pas augmenté dans la foulée des attentes élevées sont mieux placés pour surmonter cette volatilité, mais ceux qui ont été décevants sont pénalisés. C’est dans des moments comme celui-ci que la durabilité et la stabilité des bénéfices sont très prisées.
Après avoir atteint des sommets plus tôt ce mois-ci, l’indice japonais Topix a perdu 6% le 2 août en raison des craintes entourant l’incidence que pourrait avoir l’appréciation du yen (à la suite de la hausse des taux par la Banque du Japon) sur les bénéfices des sociétés japonaises2. Le Financial Times indique que les ventes massives ont pu s’accélérer lorsque les investisseurs individuels se sont départis du populaire FNBNikkei 225 à effet de levier, qui a chuté de 11,5%, et en raison d’importants ordres de vente de la part de fonds américains et européens de positions acheteur seulement. La montée du yen a entraîné un dénouement rapide des opérations de portage et a alimenté le délestage, à mesure que les positions étaient liquidées. Toutes ces activités ont provoqué une flambée de volatilité, car les investisseurs à effet de levier étrangers et locaux ont quitté le marché pour couvrir leurs positions. Les processus systématiques qui utilisent la valeur à risque dans leurs modèles ont également été forcés de réduire rapidement le risque lié à la hausse de la volatilité, ce qui a fait reculer davantage les marchés à risque.
Malgré la faiblesse de l’indice des directeurs d’achats et des données sur le chômage, rien n’indique clairement que l’économie américaine se dirige vers une récession. À notre avis, l’atterrissage allait probablement toujours être un peu difficile et, comme l’indique le mouvement des marchés, il a été un peu plus difficile que prévu il y a quelques jours à peine. Cette situation n’était pas entièrement inattendue, étant donné que certains segments du marché semblaient excessifs vu de la hausse des évaluations. Le momentum est un facteur puissant qui pousse généralement les marchés à dépasser les attentes, à la hausse et à la baisse. Les bonnes entreprises qui possèdent des avantages durables à long terme et un bilan sain n’auront peut-être aucun problème à surmonter ces épisodes de volatilité et leurs paramètres fondamentaux pourraient ne pas avoir changé de façon importante
Un dernier mot sur la concentration. Selon nous, l’indice S&P 500 n’est pas représentatif l’ensemble du marché boursier américain. L’indice reflète une poignée de très grandes sociétés seulement. À la fin de juin, trois de ces sociétés avaient à peu près la même taille que le total de notre marché boursier au Royaume-Uni. Nous pensons que ces sociétés mèneront l’indice S&P 500 et que les autres auront peu d’incidence. Il y a une certaine dissonance cognitive à l’œuvre ici, à savoir qu’un point de vue sur l’indice S&P 500 pourrait ne pas être un point de vue sur les actions américaines en général.
La préférence pour la confirmation est notre tendance à privilégier l’information qui correspond ou confirme nos convictions actuelles. Nous estimons qu’il est important de rester curieux et de chercher des personnes ou des données qui remettent en question vos convictions.
1 Bloomberg
2 Bloomberg
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