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Préparation stratégique – La clé pour composer avec les incertitudes liées aux placements et avec les biais cognitifs

Les placements en actions et en obligations portent sur les mêmes actifs sous-jacents d’une société, et il est essentiel de comprendre leur relation et leurs corrélations potentielles. Les investisseurs préparés doivent reconnaître ces liens et détecter les potentiels angles morts, en effectuant des tests de résistance complets et en tirant parti d’une collaboration multidisciplinaire afin de composer avec les incertitudes du marché.

AUTEUR

Robert M. Almeida
Gestionnaire de portefeuille et stratège en placements mondiaux

En résumé

  • Pour assurer le succès de ses placements, une préparation rigoureuse et une bonne compréhension des entreprises et de leurs facteurs fondamentaux de rendement sont indispensables. 
  • Les biais cognitifs, comme le biais de confirmation, l’effet de meute, l’aversion pour les pertes et le biais d’ancrage, peuvent aveugler les investisseurs, ce qui a une incidence sur leurs processus décisionnels et peut entraîner des erreurs de jugement au sujet des corrélations entre les actifs et des signaux du marché.
  • Les placements en actions et en obligations portent sur les mêmes actifs sous-jacents d’une société, et il est essentiel de comprendre leur relation et leurs corrélations potentielles. Les investisseurs préparés doivent reconnaître ces liens et détecter les potentiels angles morts, en effectuant des tests de résistance complets et en tirant parti d’une collaboration multidisciplinaire afin de composer avec les incertitudes du marché.

Investir est difficile, mais, au fil du temps, d’excellents investisseurs ont montré qu’il existe des moyens de réussir. Les universitaires et les partisans des placements passifs considèrent peut-être que leur rendement supérieur relève de la chance, mais, comme disait le célèbre scientifique Louis Pasteur : « le hasard ne favorise que les esprits préparés ». 

Du point de vue des placements, la préparation consiste à bien comprendre les entreprises et leurs facteurs fondamentaux de rendement. Ce travail préparatoire implique l’accumulation de données historiques sur tous les aspects de l’entreprise et de son secteur, comme l’élasticité des prix de ses produits dans divers scénarios économiques, le mode et le lieu de fabrication des produits, les risques liés aux coûts qui y sont associés. Il convient aussi de mettre le bilan à l’épreuve des pires scénarios. Cette préparation atteint son apogée avec la formulation d’hypothèses sur les différentes évolutions possibles des flux de trésorerie au fil du temps, qui sont ensuite comparées à ce que les marchés boursiers et des titres de créance anticipent. 

Toutefois, l’histoire montre que c’est souvent ce dont les investisseurs ne tiennent jamais compte qui vient contredire les attentes les plus réfléchies pour l’avenir. Chercher à savoir ce qu’on ne sait pas est déjà difficile, et la tâche se complique lorsque des biais cognitifs nous empêchent de voir certains aspects. 

Dans le domaine des placements, les biais les plus répandus sont le biais de confirmation, l’effet de meute et l’aversion pour les pertes. Toutefois, le biais d’ancrage, c’est-à-dire la tendance à accorder trop d’importance aux données précoces lors de l’évaluation des décisions futures, pourrait bientôt concerner les détenteurs de titres de créance de sociétés et leurs attentes pour l’avenir.

Des droits sur le même actif

Les investisseurs considèrent que les actions et les obligations de sociétés sont très différentes, car leurs rendements sont différents, ce qui est logique. Les actions sont des titres de propriété et, à ce titre, leur valeur est déterminée par l’estimation que les investisseurs font de la valeur actuelle des bénéfices futurs, plus la valeur de liquidation des actifs corporels et incorporels. Les obligations sont des contrats au titre desquels des capitaux ont été prêtés en contrepartie d’une promesse de rendement à une date donnée, d’une série de paiements d’intérêts déterminés et de droits de remboursement prioritaires par rapport aux porteurs d’actions en cas d’issue financière défavorable pour l’entreprise. 

J’ai toujours aimé considérer les actions comme des options d’achat sur les actifs et le rendement potentiel du capital d’une entreprise, et les obligations comme la vente d’une option de vente sur ces actifs aux porteurs d’actions. Bien que les prix d’exercice soient différents et influencés par de nombreux facteurs, comme le délai d’expiration, ils sont déterminés en fonction des mêmes éléments de base : volatilité ou niveau de risque de l’entreprise, passifs à court et à long terme, compétences opérationnelles et financières de l’équipe de direction, propriété intellectuelle, actifs corporels, etc. 

Le biais d’ancrage à l’œuvre

Le choc inflationniste de 2022 a entraîné un important pic de corrélation entre les actions et les obligations. Depuis, j’ai lu et entendu des arguments selon lesquels cette relation allait « revenir à la normale ». Mais qu’entend-on par là? Comme les actions et les obligations sont des droits contractuels sur le même actif, elles doivent être positivement corrélées au fil du temps (et le sont). Bien que ces corrélations soient faibles et offrent une diversification à long terme, elles ne sont pas négatives, malgré ce que de nombreux acteurs continuent de prétendre et d’attendre.

Le cycle d’assouplissement quantitatif des années 2010 a certes entraîné des rendements anormaux pour les actions et les obligations de sociétés, mais il a également faussé les tendances normales des prix et a produit une corrélation négative entre ces catégories d’actif. L’expérience des répartiteurs d’actifs novices au cours de cette période a pu les amener à croire qu’il s’agissait d’une relation née d’un creux artificiel des taux d’intérêt jamais vu en 5 000 ans. 

Cependant, ce qui est plus important encore, c’est de comprendre que ce biais d’ancrage a peut-être créé un angle mort qui empêche les investisseurs en obligations de sociétés de percevoir le signal venant des actions. 

L’augmentation de la volatilité des actions annonce souvent un élargissement des écarts de taux

Étant donné que les titres de créance et les actions sont des droits sur le même actif, nous ne devrions pas être surpris de constater une relation positive entre l’indice VIX, à savoir la mesure la plus suivie de la volatilité des actions américaines, et les écarts de taux des obligations américaines de catégorie investissement (figure 1). 

Bien que la volatilité des actions ait augmenté cette année, les écarts de taux sont demeurés bons. Quel marché a vu juste? Il y a selon moi deux aspects globaux à prendre en compte.

Premièrement, les catégories d’actif plus grandes et plus liquides sont généralement plus efficaces que les catégories plus petites et moins liquides, ce qui donne à penser que le signal des actions est plus fiable que celui des marchés du crédit. 

Deuxièmement, depuis que je travaille sur les marchés financiers, j’entends dire que les investisseurs obligataires sont toujours pessimistes, tandis que les investisseurs en actions sont optimistes. Même si le potentiel de risque-rendement des deux catégories d’actif est clairement faussé, je crois qu’aucune de ces deux affirmations n’est vraie. Pour simplifier à l’extrême, les analystes de crédit étudient les flux de trésorerie et calculent la probabilité que l’entreprise ne paie pas ses coupons, tandis que les investisseurs en actions établissent des probabilités quant à la part des revenus qui sera convertie en bénéfice net, après déduction des charges d’exploitation, des amortissements, etc. Autrement dit, ils analysent la même société, mais sous un angle différent, de sorte qu’ils se préparent différemment et développent à leur insu des angles morts différents. 

Bien qu’il s’agisse d’une généralisation, on peut dire que les actions font l’objet de pressions à la baisse car les investisseurs estiment que les droits de douane auront une incidence négative sur les revenus, les coûts et les bénéfices, ce qui augmente la probabilité d’une récession. Bien entendu, les marchés boursiers ont donc été les premiers à montrer des signes de faiblesse. Si les investisseurs boursiers ont raison, la situation aura inévitablement une incidence défavorable sur l’effet de levier au bilan et les probabilités de défaillance, ce qui élargira les écarts de taux.

Conclusion

Même si nous ne pouvons pas prévoir l’avenir, nous pouvons proposer des points de vue. Quelle que soit l’issue, les investisseurs doivent être prêts à affronter n’importe quelle situation. 

Même s’il est inévitable de soumettre les bilans à des tests de résistance et d’évaluer l’incidence potentielle d’un contexte de droits de douane élevés et de faible croissance sur la structure de coûts d’une société, je pense que la chance sera du côté des investisseurs les mieux préparés qui détectent les angles morts et demandent de l’aide à leurs collègues spécialisés dans les actions ou dans les titres à revenu fixe, selon le cas.

 

Les points de vue exprimés sont ceux du ou des auteurs et peuvent changer sans préavis. Ils sont fournis à titre indicatif seulement et ne doivent pas être considérés comme une recommandation d’achat d’un titre, une sollicitation ou un conseil en placement. Les prévisions ne sont pas garanties. Le rendement passé n’est pas garant du rendement futur.

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