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Pleins feux sur les titres à revenu fixe. Examen des risques extrêmes : scénarios hypothétiques pour l’année du Dragon

La cochef des placements en titres à revenu fixe, Pilar Gomez-Bravo, nous fait part de ses réflexions sur trois principaux risques extrêmes et leur incidence potentielle sur les marchés mondiaux des titres à revenu fixe et le positionnement de nos portefeuilles.

Auteure

Pilar Gomez-Bravo, CFA
Cochef des placements,
Titres à revenu fixe   

En résumé

  • La situation géopolitique est particulièrement difficile cette année en raison des élections, des guerres et des politiques macroéconomiques.
  • Un scénario sans atterrissage pourrait être pire pour les marchés qu’un atterrissage en douceur.
  • Une réduction rapide de l’endettement, bien qu’elle soit difficile à évaluer, aurait une incidence défavorable importante sur les marchés des titres de créance et les actifs risqués en général.

L’année du Dragon est censée apporter de la chance, et 2024 semble certainement avoir commencé de cette façon. Après la solide performance du marché en 2023, la majorité des analystes s’attendent maintenant à un atterrissage en douceur aux États-Unis et ailleurs. Même si les marchés des actifs risqués ont pris en compte ce scénario, trois risques extrêmes pourraient le faire dérailler, selon nous. Nous vous présentons ci-dessous nos réflexions sur le positionnement de nos stratégies de titres à revenu fixe mondiaux en fonction de ces risques extrêmes. 

Risque extrême 1 – Géopolitique

La géopolitique présente toujours un risque, mais le grand nombre d’élections, les guerres en cours et l’évolution des politiques macroéconomiques rendent l’année particulièrement difficile. 

Plus tard cette année, l’élection présidentielle aux États-Unis sera un enjeu important. Peu importe qui l’emporte, il y aura de vastes répercussions sur les risques liés à la sécurité, le commerce mondial et la politique budgétaire. Si Donald Trump l’emporte, la trajectoire à long terme du dollar américain devrait être au centre des préoccupations, surtout si la primauté du droit et la vigueur institutionnelle des États-Unis sont remises en question. Il pourrait aussi y avoir des répercussions négatives importantes sur certains secteurs ou certaines catégories d’actif, en particulier dans les marchés émergents.

La trajectoire de la politique budgétaire des États-Unis est également dans notre ligne de mire. Habituellement, pendant les années d’élection, le président sortant assouplit sa politique budgétaire. Cette fois-ci, le déficit budgétaire est déjà assez élevé et nous ne prévoyons pas de changement important à la politique budgétaire globale cette année. Peu importe qui gagne, nous nous attendons à ce qu’un déficit important persiste, mais les mesures budgétaires seraient différentes, car les démocrates continueraient probablement de se concentrer sur les dépenses, tandis que les républicains se concentreraient sûrement sur les réductions d’impôt. Dans cette optique, nous continuerons de discuter des problèmes de viabilité de la dette aux États-Unis et de la trajectoire des primes à terme sur la courbe des taux. À l’extérieur des États-Unis, les élections du Parlement européen et de la Commission en juin pourraient entraîner des frictions budgétaires ou politiques, ce qui pourrait avoir une incidence sur les devises et les marchés obligataires locaux.

En ce qui a trait à l’incidence sur les marchés, les guerres en cours en Ukraine et au Moyen-Orient mettent de nouveau l’accent sur l’énergie et les produits de base. L’Europe est mieux préparée aujourd’hui pour faire face à des pénuries d’énergie qu’au début du conflit en Ukraine. Toutefois, le marché de l’énergie pourrait encore s’effondrer, surtout si les problèmes s’aggravent au Moyen-Orient. Nous observons déjà des répercussions sur les chaînes d’approvisionnement et le coût des produits de base. Il est donc important de comprendre l’incidence du prix du pétrole sur le risque dans les portefeuilles. Pour ce qui est des risques extrêmes, les conflagrations potentielles dans d’autres foyers de tensions géopolitiques comme la Corée du Nord et Taïwan méritent d’être surveillées.

Le dernier élément géopolitique est l’évolution des politiques macroéconomiques et le contexte économique en Chine et au Japon, mais pour des raisons différentes dans chaque cas. En ce qui concerne la Chine, nous craignons que le pays ne finisse par exporter sa déflation si son programme de relance actuel ne produit pas une croissance suffisante, ce qui serait défavorable pour l’Allemagne et les marchés émergents, vu l’ampleur de leurs échanges commerciaux avec la Chine. Dans le cas du Japon, le risque extrême serait un abandon désordonné de sa politique de taux d’intérêt négatifs. Une forte appréciation du yen pourrait entraîner une liquidation des actifs étrangers par les investisseurs japonais. Ces opérations de portage rentables existent depuis de nombreuses années, et leur exécution pourrait entraîner une hausse des taux sur les marchés mondiaux des taux de base et une accentuation baissière des courbes de taux.

Risque extrême 2 – Quel atterrissage?

Même si la probabilité d’un atterrissage brutal a diminué, le risque extrême du scénario sans atterrissage aux États-Unis est devenu plus évident cette année. Ce scénario pourrait être assorti de conséquences importantes, en particulier des risques liés à une hausse potentielle de l’inflation. La stagflation est le scénario le plus inquiétant pour les investisseurs en actions et en titres à revenu fixe, mais un scénario sans atterrissage présente ses propres problèmes. Dans le cas d’un tel scénario, l’économie se redresse, poursuivant sa croissance au-dessus de son potentiel, ce qui entraînerait vraisemblablement une nouvelle hausse de l’inflation. Si ce risque extrême se concrétisait, le cycle de réduction des taux, s’il avait lieu, serait de courte durée et constituerait une situation difficile pour les banques centrales et les investisseurs. Selon nous, le scénario sans atterrissage nuirait à toutes les catégories d’actif, car une hausse de l’inflation entraînerait probablement une réaction énergique de la part de la Réserve fédérale américaine. Bien que ce scénario soit improbable, son incidence serait importante, c’est pourquoi nous le surveillons. 

Risque extrême 3 – Réduction de l’endettement

Notre dernier risque extrême est plus difficile à mesurer et existe parce qu’il y a une similarité des positions sur les marchés. La plupart des investisseurs s’attendent à un scénario d’atterrissage en douceur et, par conséquent, ils ont des thèses et des positions de placement semblables dans leurs portefeuilles. Étant donné les hausses de taux, l’endettement n’est plus gratuit. Par conséquent, nous devons tenir compte du risque systémique provenant des entités qui comptent sur un endettement important dans le cadre de leur modèle d’affaires, comme les institutions financières. Même si leurs ratios de capital sont plus solides aujourd’hui, en particulier en Europe, nous croyons qu’une autre défaillance idiosyncrasique des banques est possible, en raison, cette fois-ci, de leur exposition à l’immobilier commercial. Les fonds de couverture présentent également un risque extrême. Dans un monde où l’endettement coûte cher, certains de leurs modèles d’affaires pourraient ne pas fonctionner. Bien que les titres de créance privés puissent aussi présenter un risque (s’ils doivent matérialiser des pertes), ce dernier n’est pas aussi systémique, compte tenu de la petite taille du marché par rapport à la taille globale des marchés obligataires publics ou de l’ampleur de l’incidence qu’une éventuelle réduction de l’endettement pourrait avoir. 

Compte tenu de ce risque extrême, les investisseurs doivent agir tôt pour ne pas être en retard, et une approche rigoureuse en matière d’évaluations est essentielle. En d’autres mots, nous estimons qu’il est préférable de fournir des liquidités plutôt que d’essayer de liquider des positions saturées dans un marché non liquide. Dans un contexte aussi incertain, il est logique de privilégier la souplesse, la diversification et la sélection des titres. 

Composer avec les risques extrêmes : positionnement des portefeuilles et perspectives à l’égard des marchés

Dans le contexte actuel, il y aura probablement des gagnants et des perdants. Compte tenu de l’incertitude persistante, nous mettons l’accent sur la diversification et la liquidité des portefeuilles. Notre objectif est de tirer parti des perturbations et d’obtenir des primes de risque grâce à notre sélection des titres et à nos fortes convictions à l’égard des taux et des devises.

Taux d’intérêt et durée 

Nous avons considérablement réduit notre durée cette année en raison de la remontée des marchés à la fin de l’année dernière et des données macroéconomiques toujours solides aux États-Unis. 

Nous avons privilégié les marchés où la dynamique macroéconomique entre la croissance et l’inflation est plus propice aux réductions de taux. Par exemple, l’Europe et certains marchés émergents offrent encore des occasions intéressantes en raison des attentes quant aux évaluations et aux réductions de taux. De plus, les investisseurs en dollars américains pourraient profiter grandement des placements à l’extérieur du pays et d’une couverture en dollars américains.

En outre, nous effectuons de manière plus active des opérations sur la courbe des taux. À notre avis, qu’il y ait un atterrissage en douceur ou un atterrissage brutal, les courbes devraient s’accentuer à un moment donné et, par conséquent, nous chercherons à tirer parti de cette accentuation, en particulier aux États-Unis, qui nous permettrait d’accroître la durée si les taux augmentent de nouveau de façon importante. 

Devises 

Nous avons réduit notre exposition au dollar américain, mais nous continuons de le surpondérer en raison de l’incertitude persistante. Compte tenu des risques macroéconomiques et géopolitiques, les marchés pourraient encore connaître des périodes d’aversion au risque.

Segments des titres autres que d’État 

En raison de la réduction potentielle de l’endettement, la sélection des titres demeure importante sur les marchés des titres autres que d’État. Il est essentiel pour nous d’être à l’écoute des meilleures idées des analystes et d’avoir confiance en elles. 

Dans le segment des titres à rendement élevé, nous privilégions les titres à durée plus courte et à rendement plus élevé, recherchant un rendement total par part plus élevé étant donné que notre pondération actuelle est faible par rapport à notre fourchette historique en raison des écarts de taux serrés dans ce marché.

En ce qui a trait aux obligations de catégorie investissement, nous avons réduit nos placements aux États-Unis en raison de l’importante remontée de ce marché enregistrée depuis le début de l’année. Bien que les obligations de catégorie investissement demeurent intéressantes du point de vue des paramètres fondamentaux, compte tenu de la solidité de l’économie et de la robustesse, quoique plus faible, des bilans, les écarts de taux globaux sont serrés. Même si les écarts de taux peuvent demeurer serrés pendant une période prolongée, nous continuons de préférer les titres de créance européens sur le plan de l’évaluation.

Dans les marchés émergents, nous continuons de privilégier les titres de qualité intermédiaire, car des occasions idiosyncrasiques découlent des primes de risque sans qu’il soit nécessaire d’investir massivement dans les obligations libellées en monnaie forte. 

Les actifs titrisés semblent saturés, surtout dans le secteur des prêts hypothécaires. Nous conservons une certaine exposition au marché des actifs titrisés, en nous concentrant sur les segments que les banques devraient privilégier si elles réintègrent le marché. Cela permet de gérer le risque de baisse dans le cas où les facteurs techniques demeurent difficiles pour les prêts hypothécaires.

 

 

Les placements dans des titres de créance peuvent perdre de la valeur en raison du déclin de la qualité du crédit de l’émetteur, de l’emprunteur, de la contrepartie ou autre entité responsable du remboursement, des actifs sous-jacents ou de l’évolution du contexte économique ou politique, de la situation de l’émetteur ou d’autres conditions, ou à la perception à l’égard de ces facteurs. Certains types de titres de créance peuvent être plus sensibles à ces facteurs, et donc plus volatils. Par ailleurs, les titres de créance comportent des risques de taux d’intérêt (habituellement, quand les taux d’intérêt grimpent, les cours baissent). Par conséquent, la valeur du portefeuille pourrait diminuer en période de hausse des taux d’intérêt. Les points de vue exprimés sont ceux du ou des auteurs et peuvent changer sans préavis. Ils sont fournis à titre indicatif seulement et ne doivent pas être considérés comme une recommandation d’achat d’un titre, une sollicitation ou un conseil en placement. Les prévisions ne sont pas garanties.

Les points de vue exprimés sont ceux du ou des auteurs et peuvent changer sans préavis. Ils sont fournis à titre indicatif seulement et ne doivent pas être considérés comme une recommandation d’achat d’un titre, une sollicitation ou un conseil en placement. Les prévisions ne sont pas garanties. Le rendement passé n’est pas garant du rendement futur.

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